Station F : le co-living fait son entrée

Bienvenue à Flatmates, le plus grand espace de co-living d’Europe. Cette nouvelle offre de logements, entre résidence hôtelière et colocation, se développe en France lentement mais sûrement. Elle a séduit Station F qui accueille en septembre ses tous premiers résidents, soit 600 startupers venus du monde entier. Pour l’occasion, le campus s’est offert les services de Jean-Michel Wilmotte et d’une jeune agence de design Cutwork. Visite guidée. 

Fini le temps où les entrepreneurs innovaient dans le garage familial. En 2019, Station F les accueille dans le plus grand campus de start-up du monde : un vaste et luxueux espace de 34 000 m² où 1 013 start-up bénéficient de postes de travail, de salles de réunion, d’un fab lab et d’un auditorium. Il ne manquait qu’une pièce à l’édifice : le logement. « C’est le principal problème auquel doivent faire face nos entrepreneurs, explique Roxanne Varza, directrice de Station F. Les loyers parisiens sont chers et trouver un logement nécessite d’être en CDI, de gagner trois fois le montant de son loyer et d’avoir un garant, ce qui est loin d’être évident ». Notamment lorsque l’on vient de l’étranger, ce qui est le cas d’un tiers des résidents de Station F.

Heureusement, Xavier Niel, fondateur de Free, a des sous – il a personnellement investi 250 millions d’euros dans Station F – des terrains et de l’imagination. Il fallait une solution de logement abordable, conviviale et clé en main. Elle porte un nom : le co-living. Cette offre récemment analysée par une étude de CBRE, groupe conseil en immobiliser d’entreprise, se développe lentement mais sûrement. Elle est portée, en France, par quelques promoteurs immobiliers (BNP Paribas, Vinci…) et des start-up spécialisées (Colonies, Sharies, Livly…). Entre résidence hôtelière et colocation, le co-living propose un logement meublé associant espaces privés, espaces communs et services tout compris.

C’est le cas de Flatmates. La nouvelle résidence de Station F, réservée à ses startupers, est signée Jean-Michel Wilmotte. Située à Ivry-Sur-Seine, à dix minutes à vélo du campus, elle se compose de trois tours élégantes avec bacons de métal ajouré dont les lignes horizontales constrastent avec l’horizontalité de hautes fenêtres. Au total, cent appartements, d’une surface de 100 m² chacun, proposent six chambres donnant sur un salon avec cuisine ouverte équipée. Les résidents ont le choix : une chambre standard avec salle de bain partagée (399 euros/mois) ou une chambre premium avec salle de bain privative (549 euros/mois). Les couples auront une chambre plus grande avec salle de bain privative, bureau et dressing (799 euros/mois). Ce tarif englobe un certain nombre de services et espaces communs : salle de sport, café-épicerie, laverie, deux salons et espaces événementiels, dont l’un sur le toit, du parking, des trottinettes électriques, sans oublier le wifi et le ménage effectué tous les 15 jours avec changement de draps. Les différents colocataires seront regroupés grâce à l’algorithme de la start-up Whoomies. Elle se base sur les traits de caractères des occupants communiqués à l’inscription (lève-tôt, fêtard, discret, musicien, étudiant…) pour composer au mieux des groupes de locataires.

C’est Cutwork qui a signé le mobilier soit 15 références au total : étagère, table avec décapsuleur intégré, bancs, tabourets, canapé fait d’assises et de blocs modulables… L’agence de design a misé avant tout sur la simplicité et la légèreté de meubles robustes et fonctionnels dont on pourrait regretter le confort moelleux. Mais ils pourront être placés et déplacés à loisir en fonction des envies des habitants. L’ensemble s’appuie sur une technologie maison qui a valu à Cutwork d’être couronnée par l’Observeur du design et le Grand prix de l’innovation de la ville de Paris : un procédé breveté de pliage de tubes en métal obtenu par découpe numérique au laser. Avantages : une fabrication facilité et économe en matériau, des meubles sur-mesure livrés à plat avec possibilité de réaliser, à coût réduit et en un temps record, des petites séries à partir de fichiers numériques. Cutwork peut ainsi produire à la demande dans des usines situées au plus près du lieu de livraison.

Une belle histoire que cette jeune agence fondée en 2016 par deux profils complémentaires : un architecte ingénieur franco-japonais, Antonin Yuji Maeno et une anglo-américaine professionnelle du marketing, Kelsea Crawford. Ces deux trentenaires se sont rencontrés par hasard à une station de Velib’ parisienne. Et c’est elle qui a contacté Station F par mail pour proposer leurs services. Bingo. Cutwork a réalisé du mobilier pour les espaces de travail du campus alors en construction avant d’être interrogée pour Flatmates. Depuis, l’agence, qui compte cinq collaborateurs, s’est spécialisée dans les nouveaux espaces, type co-living et co-working. Elle s’apprête à lancer une maison en kit pour réfugiés et une gamme d’hôtel pour marque de luxe. Le hasard fait bien les choses.

Article précédemment paru dans le Design fax 1121 du 09 septembre 2019.