Dans un monde multimédial que devient le design ?

_ Et que devient le designer concepteur des identités visuelles ?

Suit-il le mouvement ? N’est-il pas encore ancré sur des schémas archaïques d’une autre époque ?

Il y a fort à parier que la réponse soit …positive !

Alors, histoire de secouer nos petites cellules grises et avant d’être ringardisés, lisons vite l’article de Peter Sieben, qui préside son agence de design aux Pays-Bas.

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Une stratégie de marque (é)mouvante…

Pour beaucoup de produits, l’emballage – la conception du packaging – reste le principal vecteur d’identification de la marque. La stratégie de marque, et donc la conception de la marque, se jouent ce pendant à un niveau beaucoup plus large et multimédial.

Aujourd’hui, nous voyons que de nouveaux développements technologiques apportent à ces marques une nouvelle dose de dynamisme et de vitalité.


Les affiches et les logos font place à d’énormes écrans Lcd et plasma. Même les magasins de mode les plus branchés délaissent les mannequins et remplissent leurs étalages d’écrans projetant les derniers défilés de mode.

Les mailings et le direct marketing se voient supplantés par l’Internet et l’e-communication ou s’inscrivent dans des solutions intégrées combinant la téléphonie mobile et le transfert de données sans fil.

Le marketing en magasin et la stratégie de marque remplacent les publicités classiques par des écrans plasma, qui présentent autant les marques que les détaillants. Car un monde mouvant, privilégie les valeurs affectives et le mouvement.
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Et nous… ? Nous restons des graphistes, parce que c’est ce que nous sommes, mais nous parlons pourtant de conception de marque…

… dans un monde mouvant

Si nous sommes réellement les spécialistes de la marque, ne devrions-nous pas justement être capables d’utiliser ces valeurs affectives pour façonner des marques intégrées à notre monde multimédial ?

Quelle est alors notre position en tant que créateurs de marques…

Sommes-nous prêts pour affronter ce changement… ?

En principe, l’évolution que connaît actuellement notre profession – la conception de marques – peut très bien être comparée à l’époque des premières automobiles. L’idée que nous nous faisions de la mobilité était déterminée par l’image du coche. Quoi de plus logique donc que de mettre le moteur à la place du cocher, c’est à dire sur le siège du cocher.

Nous faisons notre travail quotidien sous la pression des délais, sans nous poser trop de questions sur la façon dont nous le faisons…

Pourquoi faisons-nous les choses comme nous les faisons ? Par habitude et conformisme ?

Bien que nous disposions de tous les outils pour améliorer notre travail, nos processus ne diffèrent pas fondamentalement des schémas classiques.

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Lancer la démarche, créer une marque mouvante…

L’évolution de la marque et de sa stratégie connaît une phase d’accélération depuis plusieurs décennies. Pour les créateurs de marques, il ne suffit plus de concevoir une identité distinctive.
En identifiant l’essentiel d’une marque, en transformant les mots en « images mouvantes », nous pouvons visualiser les valeurs de la marque, les rendre tangibles.

Car la « stratégie de marque » n’est plus une question de valeurs purement instrumentales ou fonctionnelles.

Avec les « moodclips », les créateurs de marques disposent par exemple d’un outil unique pour visualiser les émotions d’une marque.

Leur seul objet est en effet de visualiser l’essentiel d’une marque, justement l’une des principales compétences de créateurs de marques…

Des concepts, plus que du graphisme…

« Du 2D au multidimensionnel, en passant par le 3D »

Si nous voulons réellement que les packagings deviennent les « véhicules » d’une marque, les créateurs de marques devront plus que jamais opter pour une approche conceptuelle de la marque, au-delà des confins du design graphique.

Dans le prolongement de ce concept, la forme tridimensionnelle viendra à constituer une part essentielle de la marque et de son image.

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La réalisation d’un design, plus qu’un travail graphique de précision !

Aussi étrange que cela puisse paraître, quand les concepts sont choisis, on ne dépasse souvent plus le stade de la « mise au point », du « fignolage », du « styling », en passant du centimètre au millimètre carré près. Pourtant, nos clients devraient pouvoir être séduits par une stratégie de marque « out of the box », une approche qui ferait la part belle à beaucoup d’autres applications, bien au-delà du packaging et du papier à lettre….

Le monde de la conception de marques se joue en effet dans une perspective plus large. Le développement du concept doit s’inscrire dans un contexte généralisé afin d’intéresser nos clients et leurs groupes cibles au positionnement et à l’identité visuelle….

Des études… ? Entamons plutôt le dialogue

N’est-ce pas étrange, pour mieux connaître nos groupes cibles, nous faisons appel à de coûteux bureaux d’étude de marchés, qui invitent des répondants sélectionnés, presque des professionnels, à donner leur avis sur quelque chose qu’ils connaissent à peine, complètement hors contexte et décalé par rapport à la réalité quotidienne…

A l’initiative du très dynamique Tony Ruis, président du conseil d’administration, Heineken a cherché à établir un dialogue avec des figures emblématiques, « des leaders de l’opinion », de son groupe cible. _ Cette approche constitue aujourd’hui une partie intégrante de l’organisation et a donné lieu à des sessions de travail qui se tiennent dans le monde entier, donnant des informations réelles et constantes sur le rapport entre l’offre et la demande de la marque et de ses consommateurs.
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De la même façon, nous pourrions axer nos propres processus sur une approche pro-active des groupes cibles des marques pour lesquelles nous travaillons… « La stratégie de marques est une affaire d’émotions… nous devons connaître ces émotions pour créer des marques mouvantes dans un monde mouvant. »

Sommes-nous en mesure de regarder plus loin que les quelques centimètres carrés de notre Mac… ?

La normalisation, un règlement incontournable ou des recommandations… ?

Vous les connaissez certainement, ces cahiers de normalisation « dogmatiques » remplis de représentations quadrillées et d’instructions sur la façon d’utiliser et de ne pas utiliser des logos.

Souvent d’énormes dossiers interdisant toute utilisation divergente de marques emblématiques et de styles typographiques, qui servent de « camisole de force » à une représentation uniforme d’une marque ou d’une charte graphique.

Ne serait-il pas temps de s’affranchir de ces « modèles », de ces spécifications graphiques, et de formuler de véritables recommandations visant une marque avant tout dynamique et « vivante » ?

Ne devrions-nous pas cerner l’essentiel d’une marque et le façonner avec inspiration, avec motivation, en prise directe avec un monde qui est le nôtre, avec les outils que nous avons à notre disposition… ?

Repenser le métier…

Il ne s’agit plus aujourd’hui de « simplement » concevoir un concept graphique ou de packaging. Un petit pas dans l’évolution des marques ne suffit plus…

Si, en tant que « concepteurs des marques », nous voulons réellement contribuer à leurs identités, nous devrons découvrir « l’essentiel » de ces marques mouvantes.

Et lorsque nous aurons découvert cet « essentiel », il sera temps de transformer la marque en une « expérience »…

Les relations entretenues avec des groupes cibles ne sont jamais fonction que de leurs environnements respectifs. L’uniforme est mort… vive la marque ! Une marque bien vivante dans un monde dynamique….

Allons-nous suivre le mouvement amorcé par notre société ?

Ou devons-nous avouer que, comme le livre « Die Reklame, ihre kunst und wissenschaft », notre place est en fait au musée d’archéologie industrielle, dans la section art appliqué du secteur graphique….

Oui, il est temps de repenser notre activité de conception de marques…….

« aujourd’hui, le monde va si vite que celui qui dit que quelque chose n’est pas possible est généralement interrompu par quelqu’un qui le fait. »