Design, packaging et merchandising…

Jacques Dioux est l’expert international reconnu dans le domaine de la commercialisation et de la distribution.
Il continue de partager son expertise avec les lecteurs d’Admirable Design avec ce Focus N°2 pour mieux comprendre la relation entre le merchandising et le packaging.
Utile…

FOCUS N°2

Le packaging, charnière sous–exploitée
entre design et merchandising ?

Pour revoir les concepts de design et de merchandising on pourra se reporter au
Focus de Jacques Dioux No 1 septembre 2013 « Design et merchandising sont-ils incompatibles ? »

Packaging, dans le cas d’un produit, est quelque fois traduit en français par emballage (trop général) et le plus souvent par conditionnement (trop réducteur). Ainsi aucun de ces deux termes ne reflète le concept global du packaging qui comprend huit fonctions principales. On ajoute d’ailleurs de plus en plus d’autres fonctions non polluant, durable, biodégradable etc.

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Packaging : qui fait quoi pourquoi ?
Le packaging est le fruit d’un ensemble de travaux de différents acteurs, du chef de produit design (au sens de la conception et du graphisme) au merchandiser (au sens large du contenu et de l’exploitation à la vente).
Ces acteurs sont supposés travailler dans un esprit commun marketing, la satisfaction du consommateur, mais ce n’est pas toujours le cas.
Par exemple, telle marque de bain de bouche, a cru se distinguer en remplaçant le bouchon à vis classique par un bouchon à crans conjugués avec une pression, dont le maniement est pour le moins inefficace.
C’est justement là où se pose la question de la charnière dans le packaging. En effet, certains chefs produits, pensant à tort que leur compétence est essentiellement jugée sur leur degré d’innovation sont en recherche permanente. Or leur créativité se révèle souvent obsolète ex les soi-disant sachets fraîcheur de biscottes qui n’en sont plus dès que le sachet a été ouvert, si tant est que le consommateur ait pu conserver le sachet intact du fait de la déchirure de la cellophane lors de l’ouverture.

Le packaging productif ou improductif
La forme et le volume du conditionnement conditionnent ( !) directement la productivité de l’espace occupé.
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Le packaging cosmétique
Voici deux montres :
1. Une montre de marque Swatch le leader du marché .Elle est nue, sans packaging, c’est une innovation majeure car c’est le produit lui-même qui, par son originalité sa forme, sa couleur, son style, attire l’œil. . On a ainsi l’impression que c’est tout cet ensemble (forme, couleur…) qui constitue le véritable packaging séduisant le client et que le produit est à l’intérieur comme dans une coque colorée.
En fait un véritable « produit/packaging », qui de surcroît est en même temps une solution merchandising très vendeuse, car permettant au client de toucher les montres pendues à la verticale ou posées inclinées.
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2. Une montre d’une autre marque
Ses concepteurs ont réalisé un produit dont les couleurs, les formes évoquent le leader du marché. Pour tenter de s’en distinguer, ils utilisent un packaging « cube » qui enferme le produit en privilégiant l’idée du packaging « ice cube ». Ce packaging surajouté au produit, non seulement ne lui apporte rien mais n’est pas synergique avec son esthétique recherchée.
C’est un cas type de packaging cosmétique.
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Ice Watch Chrono Electrik Blue

Le choix de la face marchande
La face marchande (FM) est à la fois un facteur d’occupation du linéaire et d’attractivité visuelle pour le client. La difficulté pour le fournisseur, et pour le distributeur, est de trouver un équilibre entre une grande FM très attractive, mais consommatrice de place, et une FM plus petite, moins attractive, mais plus économe. D’où référencement ou non.

Le packaging du vide ou de la photo « améliorée »
Rappelons que des marques bien connues ,notamment de céréales ou de muesli pour petits déjeuners, vendent des boîtes non remplies à 100 % (environ 20 % de vide) pour disposer d’une surface de communication plus large et faire accroire qu’il y a plus de produit.
Autre cas : la valorisation abusive du produit par une photo agrandie ou « améliorée » par exemple l’épaisseur du fromage fondant du croque monsieur présentée au double de la réalité
Dans ces deux cas, il s’agit d’une forme d’escroquerie puisque le produit réel ne correspond pas à l’idée que le consommateur s’est fait à partir du packaging

Un packaging glamour pour un PGC féminin
Dans ce cas, le packaging est associé en rayon à un visuel très glamour .Ce visuel positionne en haut de gamme des collants à MDD Envog. Les prix ne sont pas indiqués par un pancartage agressif type promo. Ce sera la bonne surprise de la cliente de découvrir qu’elle peut, mais oui !, être aussi glamour que le mannequin pour un prix aussi bas. Cela lui confirme avec élégance (à tous les sens du terme) , ce qu’elle savait déjà : « Chez E.Leclerc, vous savez que …) »
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Un conditionnement permanent envog, bénéficiant de la marque repère

Le packaging avant le produit
A delà de ses fonctions basiques, le packaging devient un objet de communication et d’animation à part entière et peut se singulariser par différentes techniques par exemple le détournement.
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Le collector
Le concept de collector est un mix commercial qui associe un PGC de très forte notoriété et une signature ou griffe très connue.Ces deux constituants étant a priori antinomiques font tout l’intérêt, l’attractivité visuelle, et bien sûr la valeur commerciale du produit collector.
Le but est de débanaliser un PGC en l’associant à une griffe, et dans le même temps de donner à cette griffe un territoire de communication qu’elle n’a pas dans son champ d’activité habituel. On remarquera que le prix du collector étant très supérieur à celui du PGC de base, de l’ordre de 5 voire 10 fois , ou plus selon la notoriété de la signature, l’acheteur a le sentiment d’acheter un produit de catégorie supérieure, voire d’entrer dans une communauté de privilégiés
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Quelle est alors la place de tels packagings dans le linéaire ?
Du fait de leur « look » et de leur prix, les collectors seront assurément en dehors de leur famille de produits, car ils ne créent pas la même motivation d’achat des clients. C’est un achat d’impulsion, plaisir et non utilitaire
On notera également le marché d’occasion des collectors de produits de grande marque, ce qui confirme bien que l’on ne vend pas un produit à consommer, mais un objet quotidien signé à conserver en collection. La vente sur un site leader en e.commerce en est une preuve supplémentaire.

Le collector « série limitée »
A la différence du collector PGC ci-dessus, le collector « série limitée » est un produit de niveau et de prix plus élevés .Il enrichit la gamme de la marque par le haut en séduisant les clientes avec des articles qui renouvellent leur intérêt pour la marque. Voir figure 12
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Que conclure de tout cela pour répondre à notre question de départ « Charnière sous exploitée entre design et merchandising ? »

Un constat : le packaging, au delà de ses fonctions de base, et de par ses acceptions et utilisations comme, l’approche britannique l’illustre bien, ouvre un univers de possibilités sans limites.
Par ailleurs, le packaging est le fruit d’un ensemble de travaux de différents acteurs, ce qui met en valeur son rôle charnière , par exemple dans le choix du volume et de la face marchande .Or c’est précisément la multiplicité des situations qui crée l’opportunité d’identifier des charnières à la base d’une collaboration.

3 réflexions/actions
Pour accroître les synergies interprofessionnelles

1 Pratiquer le jeu de l’approche britannique en regroupant les acteurs concernés design et merchandising (3 p mini, 6 p.maxi)
« Packaging serves a variety of purposes for both the company and the consumer. »
A vous de les identifier, mais dans le cas particulier de votre entreprise et de vos clients
2 Parmi les nombreuses charnières de collaboration qui apparaîtront, à vous d’identifier votre charnière prioritaire.

3 Créer un groupe fonctionnel d’amélioration de la charnière avec les acteurs qui ont
participé au jeu d’approche

Comment mener une réunion de travail productive ?
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Source a6pro.over-blog.fr
Il ne suffit pas de remercier de la collaboration, mais il faut tenir compte des travaux et des acteurs pour agir.
Laissons aux politiques et aux grandes administrations le soin d’enterrer les recommandations productives des études qu’ils ont commanditées. Ils y excellent !