Un design pas trop parfait, svp…

Le design serait-t-il à son tour frappé du « syndrome Adjani » obsédée par la perfection illusoire du look ?

Laurent Collangettes, directeur de l’agence Lonsdale donne un intéressant point de vue sur le sujet. A bas Photoshop ?

Hum… les consommateurs semblent réagir à trop de perfection eux aussi…

admirable_design_publicite-3.jpg_

L’esthétique de l’imperfection

Perfection et imperfection. Si les deux peuvent être beauté, seule l’imperfection peut faire le charme. Citation d’Angélique Planchette

Nous passons notre temps à chercher ce qui va séduire ou déplaire aux consommateurs. Nous observons et nous tentons de comprendre les leviers capables de déclencher leurs passions pour les marques.

Depuis quelques années nos outils, et je pense en particulier à Photoshop, nous permettent d’obtenir des résultats spectaculaires quant à ce que j’appellerais des effets de séduction visuelle : des textures transparentes, des éclats de lumière ou des contrastes de couleurs que je qualifierais de surréalistes. Des images qui ont jusqu’à présent fait faillir tous les consommateurs…

admirable_design_regard.jpg

Mais les différentes crises ont provoqué un retour en force à l’authentique. Les consommateurs prennent consciences du mensonge visuel induit par des images « sans défaut ». Ils ne se reconnaissent plus et ne se projettent plus dans les images idéalisées que nous leur servons.

Dans cette surenchère d’artifices, nous perdons petit à petit leur intérêt car nos créations perdent leur âme, ces petites traces d’humanité ou ces petites maladresses particulières : le trait d’un crayon, le mélange inachevé des couleurs, la spontanéité du dessin, en clair, toutes ces petites imperfections émouvantes et sincères.

admirable_design_shampooing.jpg

Des valeurs que les marques aimeraient, aujourd’hui, se réapproprier !

Au Japon, le Wabi-sabi est l’art de reconnaître la beauté singulière dans toute chose, qui au premier abord semblait imparfaite : des pétales de cerisier tombés sur le sol d’un jardin zen, la patine irrégulière d’un bol en terre cuite ou simplement la forme torturée d’une branche d’arbre…

Le cinéma, la musique ou la mode nous ont récemment montré que l’impression de négligence créative ou la notion de création hasardeuse permettait de retrouver une émotion intense et profonde.

Ce sujet a été de nombreuse fois abordé dans la publicité ou la presse pour dénoncer les tricheries des mannequins ou des « peoples » trop retouchés pour dissimuler leur véritable nature.

Mais ce thème n’avait jamais été traité dans le design. Quelques initiatives récentes dans les domaines de l’identité visuelle, du packaging ou du retail montrent que le phénomène s’étend et que quelques agences réagissent. Certaines tentent en effet de retrouver l’intérêt du consommateur en laissant une part d’imperfection dans leur création.

On peut, par exemple, trouver des packagings avec des fenêtres pour laisser entrevoir un produit autrefois caché car il n’était pas suffisamment attractif !

Les consommateurs auraient-ils enfin compris ce qui faisait vraiment le charme de la vie et qu’elle n’était pas lisse et édulcorée ? !

Les visuels qui illustrent cet article sont extraites de campagnes L’Oréal. Copyright L’Oréal