Métropolitaine Randonnée

KM4 : La ligne 16 entre en piste, 3 lieux, 3 week-ends, 3 fêtes

Par Florence Grivet, architecte.

En ce beau mois d’octobre ensoleillé, le Grand Paris Express sort de l’ombre.

Interpelée par un article dans Télérama, je me suis laissée embarquer par l’association « Enlarge your Paris  » dans ses balades urbaines le long (et en surface) des tracés des futures lignes de métro. Ceci dans le cadre du coup d’envoi des travaux du Grand Paris Express, porté par la Société du Grand Paris.

Le cycle de randonnées a démarré durant l’été, dévoilant dans un premier temps, le parcours de la future Ligne 15, au sud de Paris, puis les samedis d’octobre, celui de la Ligne 16, au nord.

Carte des futures lignes de métro à l’horizon 2030 © Les Échos – Elsa Dicharry – Michaël Mastrangelo

L’objectif : faire découvrir le passé industriel et maraîcher de Paris et nous projeter jusqu’aux travaux du Grand Paris. Chaque randonnée est conduite par un membre de Enlarge Your Paris et de l’Office du Tourisme de Seine-St-Denis, ainsi que par des architectes et divers intervenants venus enrichir le parcours. A travers ces marches exploratoires, « l’idée est de faire l’expérience un peu physique de ce tracé qui va bouleverser le Grand Paris  ».

En route pour le Bourget par exemple, nous ont ainsi été présentées diverses initiatives actuelles, pour la plupart situées dans des friches industrielles : La cité Fertile à Pantin, « territoire d’expérimentations, de célébrations et de rencontres… propice à la fertilisation collective… pour imaginer et construire un avenir joyeux et durable », la Halle Papin, qui propose des « espaces de travail et de lieu de convivialité à faible coûts pour de jeunes structures », le Laboratoire d’Aubervilliers « lieu de recherche et de création, de ressources et d’expérimentations » et le Fort d’Aubervilliers investi « par le collectif Recup Paris avec l’ambition d’en faire un centre culturel riche et éclectique ».

L’aboutissement de la balade : le KM, un événement itinérant dont le nom symbolise les  kilomètres (KM) à parcourir jusqu’à la mise en service du Grand Paris Express.

L’entreprise du Grand Paris Express représente 200 km de métro, 68 gares, 140km² sur les territoires du Grand Paris, une prévision de 2 millions de voyageurs par jours… et un bel investissement financier.

Pour ces KM, Culture et Création du Grand Paris Express, en partenariat avec le 104 Paris, offre une programmation artistique et culturelle invitant les habitants et les curieux, nommés  « les grands parisiens »,  à fêter le démarrage des travaux des gares des futures lignes et les réconcilier, l’espace d’un instant, avec ce qui peut être vécu comme de fortes nuisances.

Le Gyrotope de Pablo Valbuena © Société du Grand Paris – Christophe Morin

« En lien avec le calendrier des chantiers, des rassemblements artistiques, culturels et festifs ont vocation à fédérer les énergies locales autour des chantiers, en mettant en avant les thèmes de l’Architecture et du Design, qui concernent 37 agences d’architecture et 2 designers , Patrick Jouin pour les équipements et le mobilier, et Ruedi Baur pour le graphisme et la signalétique ».

« Chaque acte spécifique ou spectaculaire de génie civil sur les chantiers, comme l’installation de grues, le lancement d’un tunnelier ou le ripage d’une dalle, donne lieu à une proposition artistique interprétée avec le territoire autour d’un repas de chantier ».

En l’occurrence pour la ligne 16, le « KM4 » annoncé par le slogan « la ligne 16 entre en piste »,  concerne les habitants de Seine St-Denis et annonce sur 3 week-ends le coup d’envoi de 3 gares : La Courneuve – Six Routes (architectes Chartier Dalix), Le Bourget (architecte Elizabeth de Porzamparc), Saint-Denis Pleyel (architecte Kengo Kuma).

Dans chacune de ces villes un site a été délimité pour l’événement et aménagé, le temps d’un week-end, selon un même principe de scénographie, adaptée et complétée par une ambiance spécifique à chaque lieu.  Au Bourget l’œuvre nomade, le  « Gyrotope » de Pablo Valbuena , peut évoquer dans son animation lumineuse et sonore un trafic aérien. A St-Denis l’esprit forain autour de la flamme renvoie à la proximité de l’Académie Fratellini et un futur olympique ?

Entrée du site de la Courneuve © Florence Grivet

L’enseigne « Base Express » dressée sur un portique en tubes d’échafaudage signale l’entrée de la fête. S’ensuit tout un aménagement temporaire assez réussi, dans un langage de chantier tant par les couleurs, avec ses touches fluo, que par les matériaux : tubes de métal galvanisé, bois brut, panneaux de contre-plaqué, bâches plastique, toiles de tente, ou accessoires : quilles, rubans et balais de chantier…

Atelier Enfants sur la protection © Florence Grivet

Dress code : gilet jaune obligatoire, offert à l’entrée. D’ailleurs, vous êtes accueillis par une petite chorégraphie de gilets jaunes.

Une grande tente abrite l’exposition des maquettes de toutes les futures grandes gares, sur un mobilier nomade présentant les vidéos des interviews des différents architectes.

Mobilier d’exposition – La Courneuve © Florence Grivet

On y trouve aussi un espace d’ateliers didactiques pour enfants et à destination des écoles dont celui qui présente toutes les protections sur un chantier (succès garanti dès lors qu’on enfile les costumes), ou celui qui expose les différents métiers présents sur le chantier.

Atelier Enfants © Florence Grivet

Un ensemble de petits chapiteaux en bastaings de bois brut et bâches présente les tunneliers, abrite les événements artistiques : chanteurs, danseurs… et offre à déguster collectivement sur des tables et bancs de chantier en bois brut le fameux gigot-bitume, tradition dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Banquet gigot-bitume à St-Denis © Florence Grivet

Parmi les moments magiques de ces soirées conviviales, la traversée d’une funambule en talons hauts sur un fil tendu entre deux foreuses ou une inattendue « visite déguidée » apportent une tonalité poétique ou décalée.

Jeu © Florence Grivet

Traditionnel gigot-bitume de chantier © Société du Grand Paris – Julie Bourges

Cet événement à forte fréquentation selon la proximité du site du centre-ville, présente pour moi son intérêt car d’une manière festive il permet à une population de se sentir ainsi prise en compte, de visualiser le changement qu’elle va subir et de pouvoir échanger avec les nombreux médiateurs présents. Et il permet aux parisiens audacieux d’élargir leur point de vue de la capitale. La fête peut durer jusqu’à minuit (retour métro assuré).

A St-Denis Pleyel, la fête, installée à l’emplacement du futur village olympique, annonce aussi l’implantation des prochains JO de 2024.

J’attends avec impatience les prochains parcours d’Enlarge (Merci !) au printemps, et KM qui ré-enchante, au moins pour un instant, le monde des grands chantiers.

A suivre…