CY : le design à l’université

Dominique Sciamma a rejoint CY Cergy Paris Université pour y prendre la direction de la filière design. Jusque-là directeur de Strate École de Design, il conserve la présidence de l’APCI.

Vous venez de quitter la direction de Strate École de Design. Que cela vous inspire-il ? 
D.S. Quand j’ai pris la tête de Strate, il y a cinq ans, l’école a connu un développement spectaculaire : géographique, mais aussi en matière de recherche, de partenariat ou de notoriété – avec l’appui de Galileo (ndlr : groupe auquel appartient Strate) que je tiens à remercier ici. Lorsque je quitte Strate, le mois dernier, deux constats m’apparaissent clairement : en premier lieu, il est possible de développer une démarche entrepreneuriale dans une école de design tout en satisfaisant aux exigences académiques, sachant qu’un tel projet est néanmoins incompatible avec la volonté d’atteindre une croissance de 15 % par an ; d’autre part, la parole des écoles publiques pour ce qui concerne le design est inaudible – ce qui est anormal pour un pays comme la France où il leur revient de donner le la.

Que décidez-vous de faire, par conséquent ?
D.S. Je me suis demandé dans quel environnement je pourrais développer une école de design combinant une démarche entrepreneuriale et exigences académiques. La réponse m’est apparue assez évidente : un environnement dans lequel la puissance publique prenne la parole sur le design et sa pédagogie, et en même temps qui est synchronisé avec les enjeux politiques de notre temps (gouvernance, diversité, climat, etc.) – des enjeux de la transition en quelque sorte. C’est ainsi que je rejoins CY Cergy Paris Université pour y prendre la direction de la filière design qui aura plusieurs composantes : une école de design – incubée dans l’école CY Tech – qui va former en cinq ans des « designers de la transition » bénéficiant d’un diplôme universitaire sur le modèle LMD ; un parcours ingénieur designer ;  des Bachelors et des Mastères spécialisés mixant sciences et design – le premier Bachelor sera le Datascience by design ; la création de formations professionnelles continues dont un MBA ; un laboratoire de recherche avec à la fois des thématiques spécifiques et des collaborations avec les autres laboratoires de CY ; un centre d’innovation pédagogique par le design pour amener le design dans les pédagogies de l’université ; et enfin, une chaire industrielle dont je serai le titulaire. J’en profite pour signaler que projet est avant tout l’histoire d’une rencontre avec François Germinet, le président de CY, au cours de laquelle j’ai découvert son projet d’université expérimentale combinant excellence académique, volonté d’interdisciplinarité et professionnalisation – le tout dans une démarche entrepreneuriale et altruiste. Du coup, nous nous sommes aperçus que nous avions la même vision – comme le démontre la devise de CY « Design your life ».

Quels sont les avantages d’une filière design au sein d’une structure publique ?
D.S. Les avantages de cette filière design au sein de CY sont multiples : nous réinventons l’école de design public et nous réinventons la diversité des étudiants, car le prix de la scolarité se pose beaucoup moins (nous serons trois fois moins cher que les grandes écoles de design privées). Autre avantage, lié à la crise sanitaire : on ne peut plus enseigner les mêmes choses de la même manière et nous avons une volonté commune avec François Germinet de resynchroniser programmes et modalités pédagogiques avec les exigences du moment qui apparaissent comme certainement durables. Il est plus aisé de se mettre dans ce nouveau contexte en ouvrant une école de design « from scratch » plutôt que d’adapter une structure existante. Enfin, la France va enfin se mettre au niveau des grandes universités internationales qui ont toutes une école ou une faculté de design – Harvard, Carnegie-Mellon, TU Delft, Aalto, NUS, etc.

À quand l’ouverture officielle ?
D.S. Ce sera pour septembre 2021, sachant que Parcoursup va nous référencer dès janvier 2021. Les promotions seront de 100 élèves, ce qui signifie 500 élèves à terme en formation initiale design. Quant aux formations professionnelles, elles devraient pour certaines être ouvertes avant cette date.

Une interview de Christophe Chaptal

Article précédemment paru dans le Design fax 1166