L’ innovation et ses mythes

Bertrand Raison, le Monsieur stratégie de l’agence Saguez & Partners, nous offre ses réflexion sur la nécessité de l’innovation et la persévérance de quelques idées reçues. Clair.

L’innovation ou le mythe de l’éternelle jeunesse ?

Qui dit innovation dit jeunesse ? On lui prête les faveurs merveilleuses d’une éternelle fraîcheur, le temps n’aurait sur elle aucune emprise. Ainsi vont les idées toutes faites, elles ont la vie dure et, avec leur air têtu, elles semblent dire la vérité. Une barrière d’âge séparerait irrémédiablement deux publics : d’un
côté, les jeunes par définition toujours créatifs et de l’autre, les vieux désespérément ancrés dans l’immobilisme le plus tenace. Dans la foulée, les pays neufs qui se reconstruisent sont crédités de tous les mérites, tandis que les vieux pays crouleraient sous le poids d’une léthargie plus ou moins prononcée. Même l’exemple de la Swatch venant d’une Suisse très vénérable ne suffit pas à dissiper le malaise.

L’innovation débat des marques ou débat des consommateurs ?

La controverse jeunes/vieux n’en cache t-elle pas une autre ? Celle qui opposerait des marques parfois jugées trop conservatrices face à des clients avides de changement. Ceux-ci en veulent toujours plus et sont prêts à toutes les expériences pour peu qu’elles leur facilitent la vie. La Twingo prévue au départ pour les jeunes conducteurs a été plébiscitée par les seniors. La vraie innovation n’est-elle pas justement celle qui est utile ?, Celle qui fait voir les choses autrement. Mais l’accueil fait au changement est peut-être plus  » facile  » que la volonté de changer. Certains secteurs, comme la banque, sont, en France, particulièrement réfractaires à l’évolution. Est-ce l’interne qui fait de la résistance ? Ou le destin qui fait que toutes les banques se ressemblent ? Cela dit, la fortune sourit aux audacieux, La Caixa a su sortir de la grisaille de l’identité bancaire, comme TNT ou FedEx ont su révolutionner l’univers de la référence postale.

L’innovation se réduit-elle à la création d’un logo ?

Un bon logotype traduirait-il à lui seul le changement ? La nouveauté de l’identifiant est-elle nécessaire et suffisante ? Le logo Orange assume-t-il à lui seul l’extraordinaire métamorphose qui a transformé Itinéris en une marque globale du mobile ? À y regarder de près le logo apparaît bien comme la plus petite partie émergée de l’identité générale. Ce qui fait la force d’Orange, c’est le tout le système qui le soutient ; c’est l’attention graphique portée à l’ensemble des modes d’expressions (documentation, édition, web design, sponsoring, événements, communication…) Il n’y a pas de déclinaison basique du logo répétée à l’infini, mais, au contraire, un sens remarquable du détail qui fait que l’ensemble est parfaitement cohérent. Conséquence, Orange se voit mieux qu’Itinéris. Le bénéfice de cette vigilance de tous les instants est triple : clarté de l’univers  » mobile « , lisibilité des offres et pérennité de la marque.

Bertrand Raison