Nicolas Minvielle, responsable des marques Philippe Starck et fondateur du groupe Design Conseil avec Emmanuel Keller, revient sur un sujet déjà abordé dans nos colonnes par la juriste Ryane Meralli : la protection des créations.
Le sujet mérite bien plusieurs éclairages…
La protection par les Dessins et modèles en Europe
Depuis quelques années, l’OHMI (Office pour l’Harmonisation sur le Marché intérieur) a mis en place une procédure centralisée de dépôt de dessins et modèles. On peut ainsi, grâce à une seule formalité, déposer ses créations dans tous les pays Européens sans avoir à se tourner vers tous les offices nationaux un par un.
Outre les conditions de forme (avoir payé les taxes et bien rempli le formulaire par exemple), deux principales conditions de fonds existent :
1. Le dessin et modèle doit être nouveau : un modèle est nouveau si dans la pratique normale des affaires, il pouvait être raisonnablement connu. Il n’est pas nécessaire que la divulgation ait lieu dans la CE. Il suffit que les professionnels d’un secteur et membres de la CE aient eu l’occasion de le voir dans le cadre de leurs affaires. Par exemple, il suffit qu’il ait été présenté à un salon.
2. Il doit avoir un caractère individuel : l’impression globale produite sur l’utilisateur averti doit différer de celle produite sur lui par tout autre dessin ou modèle divulgué au public avant la date de dépôt.
Pour illustrer le cas, on peut se poser la question de savoir si la New Beetle aurait pu décemment être protégée par les dessins et modèles :
En ce qui concerne la nouveauté, elle est clairement existante : les deux voitures ne sont pas absolument les mêmes. En ce qui concerne le caractère individuel cependant, on pourrait se poser la question. A priori, la nouvelle dispose de suffisamment de nouveaux éléments pour que l’impression globale dégagée soit différente et ainsi créer une individualité.
Protégeable donc ?
Sur le principe pourquoi pas, mais on imagine bien que si la voiture du dessus avait été dessinée et développée par Renault, Volkswagen aurait attaqué Renault pour contrefaçon. _ Or, si c’était une contrefaçon, cela voudrait dire qu’elle n’a pas de caractère individuel….
Il est donc parfois difficile de trancher clairement sur ce qui est protégeable ou non….
Parallèlement à cette procédure standard de dépôt, l’OHMI a mis en place le DMCNE ou Dessin et Modèle Communautaire Non Enregistré. Le DMCNE est protégé contre la copie pendant une période de trois ans à compter de la première divulgation au sein de la Communauté. Il n’y a pas de taxes à payer, et la protection est automatique.
Attention cependant, car, bien que fort utile, il ne permet pas de s’opposer à la création indépendante réalisée par un créateur dont on peut raisonnablement penser qu’il ne connaissait pas le modèle. En d’autres termes, le dessin et modèle enregistré permet de s’opposer à tous tandis que le DMCNE ne permet pas d’empêcher un autre créateur d’utiliser un produit qu’il aurait dessiné seul de son côté…
Chose primordiale, il faut bien évidemment être en mesure de prouver la première publication : journaux, salons etc.
